Au secours!!!!! Les pléonasmes sont PARTOUT!!!
À l’instant où j’écris ces lignes, il pleut des cordes dehors, et des rafales de vent font claquer dangereusement les volets. Pouvais-je prévoir d’avance que cette météo exécrable me bloquerait chez moi, m’incitant à m’installer derrière mon écran et à écrire mille arguties? J’avais pourtant réservé d’avance une très bonne table dans le restaurant le plus coté de la ville, voire même du département. Petite folie que je m’accordais malgré la conjoncture actuelle, et sans l’autorisation préalable de mon banquier par dessus le marché! Tant pis si je terminais le mois dans le rouge, je demanderais alors une petite rallonge à mes amis… Après tout, vous et moi serons tous unanimes pour dire que ça sert à ça, les amis: être solidaires les uns des autres!
…
Wahou!!! Vous avez tenu jusque là? Je vous tire mon chapeau! Il y a belle lurette que j’aurais cliqué sur « Précédent » à votre place!
Ben oui, c’est vrai quoi. Il n’y a rien de plus énervant qu’un pléonasme! Alors quand ils s’enchaînent à la vitesse de l’éclair, il faut avoir le cœur bien accroché…
Quand on en croise un au détour d’une lecture ou d’une conversation entre amis, il est très difficile de réprimer un petit sourire narquois (au mieux) ou une réflexion désobligeante (au pire) à l’encontre de son auteur!
(rassurez-moi, je suis pas le seul à qui ça fait ça ???)
(si ?)
Pourtant, mieux vaut rester zen face à eux… Tout simplement parce qu’ils sont PARTOUT!!! Insidieusement, sournoisement, les pléonasmes ont envahi nos vies.
Commençons par les grands classiques: monter en haut, descendre en bas, sortir dehors.
Fastoche.
Ceux-là, on les détecte de loin.
D’autres sont plus ancrés dans nos habitudes de langage. Dire tout haut et penser tout bas, par exemple, sont souvent employés de paire dans la très célèbre expression: « oser dire tout haut ce que tout le monde pense tout bas ». Un combo dévastateur qui a au moins le mérite de donner du punch à la phrase… Il faut bien avouer que se contenter d’un très fade « oser dire ce que tout le monde pense » serait certes grammaticalement beaucoup plus correct mais aussi beaucoup moins percutant!
Certains pléonasmes sont même vraiment très difficiles à repérer. La prochaine fois qu’un gendarme vous arrête au volant de votre voiture pour vérifier votre taux d’alcoolémie, vous pourrez ainsi lui faire remarquer que la formule qu’il emploie est redondante. L’alcoolémie désignant déjà le « taux d’alcool », le mot se suffit à lui-même. Pas sûr qu’il apprécie sur le coup mais, après réflexions, je suis sûr qu’il vous sera reconnaissant de lui avoir ouvert les yeux.
Même idée avec le tri sélectif… Trier, n’est-ce pas déjà sélectionner? Le problème, ici, c’est que celui qui voudra éviter ce bégaiement de langage sera bien embêté pour bien se faire comprendre et éviter les quiproquos…
Tant que j’y pense, pensez-vous qu’il soit possible de talonner quelqu’un de loin? Non? Alors quel intérêt de préciser qu’une personne se fait talonner de près? Un tic de langage qu’il faudra absolument corriger.
Quand même l’Académie française s’y met…
On pourrait attendre de nos vénérables Académiciens qu’ils emploient toute leur énergie pour éradiquer ces anomalies linguistiques.
Mais non.
Les bougres vont même jusqu’à donner leur blanc-seing pour certaines expressions incongrues!
Ainsi, ils trouvent normal de donner le gîte et le couvert à quelqu’un. Pourtant, « le couvert » désigne bien dans cette expression le toit couvrant une habitation (à rapprocher de l’expression juridique « le clos et le couvert ») et non la fourchette et le couteau!
Donner le gîte et le couvert, revient donc bien à dire que l’on offre « l’endroit où passer la nuit et le toit ». Si ça c’est pas un pléonasme, je ne m’y connais pas.
Préférez donc à l’avenir employer la seule expression correcte: donner le vivre et le couvert!
(le vivre dans le sens de nourriture, et le couvert dans le sens de toit)
Même combat avec l’expression désormais populaire au fur et à mesure… Ben oui, le fur, c’est un mot employé au Moyen-Age synonyme de « prix » ou de « valeur », souvent employé dans l’expression « au fur » qui voulait alors dire « à mesure », ou « en proportion ».
Ainsi, Paul Claudel emploie-t-il l’expression à bon escient lorsqu’il écrit:
Au fur de la marche et du jour, je m’avance parmi le développement de la doctrine.
(Le Promeneur, Paul Claudel, 1920)
« au fur et à mesure » signifie donc littéralement « à mesure et à mesure »… Joli pléonasme consacré par l’usage!
Quant au fameux au jour d’aujourd’hui… no comment. Là, on dit carrément TROIS fois la même chose, hui signifiant déjà « ce jour ». Quand je l’entends, celui-là, j’applaudis des deux mains.
(ouais, bon, j’applaudis, quoi)
Et que dire de l’oxymore? À quoi bon préciser « mort »… a-t-on déjà vu des occis vivants?
(celle-là, je l’ai piquée au Geektionerd 🙂 )
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Djinnzz
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Très très instructif surtout sur les vieilles expressions (je n’avais jamais imaginé que couvert ne signifiait pas vaisselle dans ce cas :p )
Mais est ce vraiment une faute de français d’employer un pléonasme ? Ou est ce juste déplaisant pour certaines personnes ? (moi personnellement en toute intimité personnelle cela ne me dérange pas)
En fait, le pléonasme n’est pas une faute de français à proprement parler, mais une figure de style…
Ainsi Molière l’utilise-t-il (à bon escient, lui) dans le Tartuffe, par exemple (1664) :
« Je l’ai vu, dis-je, vu, de mes propres yeux vu, ce qui s’appelle vu. »
ou encore Fénelon dans Les Aventures de Télémaque (1699) :
« Cette horreur qui fait se dresser les cheveux sur la tête et qui glace le sang dans les veines. »
Le pléonasme peut donc s’avérer parfois bien utile… à condition d’être dompté par son utilisateur, et donc de l’utiliser à bon escient ! 🙂
Plein d’humour et toujours très intéressant !
Maître Djinnzz, c’est toujours un plaisir de te lire !!
On vouvoie le « maître », voyons !
Je suis sur le c** concernant « au fur et à mesure » et « le gîte et le couvert »…
Pour le reste, rien de nouveau sous le soleil, bien que toujours aussi plaisant à lire 🙂
Si j’ai bien compris, « Maître Djinnzz » est un pléonasme puisque Djinnzz est passé maître dans l »art de nous intêresser !
« Si on prend le terme de pléonasme dans le second sens de superfluité, c’est un véritable défaut qui tend à la battologie », Deauzée (XVIIIe siècle)
La battologie étant une répétition inutile, de Battos, nom d’un roi de Cyrène qui était bègue.
(c’est pas gentil de se moquer des bègues)
(mais c’est pour la bonne cause)
Ahah ! Excellente citation, je ne connaissais pas ce Battos.
La battologie c’est un nom autrement plus classe que le bégaiement… Je retiens et je tenterai de le replacer !
Ouais mais du coup, Si le gîte ne veut juste dire que c’est l’endroit oùl’on passe la nuit, c’est bien de préciser qu’il y ait un toit avec. Parce qu’un clochard qui vit dans la rue pourrait nous offrir le gîte mais malheureusement pas le couvert.
Et on peut sortir à l’intérieur de quelque chose aussi comme on peut monter en bas ou descendre en haut.
Mouais mouais mouais…
🙂
Par exemple, prenons une personne en bas d’un immeuble et gardons le comme référentiel. En haut de l’immeuble, un homme descend d’un étage, il a techniquement descendu en haut. Et inversement, si un homme monte d’un niveau dans un sous-sol, il a monté en bas.
Et quand je suis chez moi, si je sors de ma chambre, je reste toujours à l’intérieur je suis sorti à l’intérieur de chez moi.
Mais là je joue sur les mots et les technicités ^^
Super blog que j’ai découvert il n’y a pas longtemps. Continue comme ça !
Bisou nucléaire. <3
Super article, plein d’humour drôle 🙂
Mais bon, dire qu’un article de Djinnzz est bon, c’est déjà un pléonasme en soi ! 🙂
L’oxygène m’a bien fait rire !
Au fur et à mesure et le gîte et le couvert, j’ignorais !
Comme d’habitude, je n’ai pas eu l’impression de perdre mon temps !
* il fallait lire l’oxymore, bien sûr !
(même si l’oxygène peut être rigolo aussi, paraît-il…)
Salut. Dire en titre d’un article sur les pléonasmes qu’ils sont partout même là où on ne les attends pas, c’est un truisme, une lapalissade, un pléonasme de l’esprit. Personne n’est à l’abri, surtout quand on cherche à faire des titres accrocheurs à la con.
Pour les titres racoleurs, tu devrais aller voir ce qui se passe du côté du Daily Geek Show ou du journal du Geek… là tu seras servi 🙂
Mais bon, j’aime bien les haters à la con dans ton genre… ça donne l’occasion de bien rigoler !
Le truisme, c’est la femelle du cochonsme ?
A mon humble avis, »@PL » et »accrocheurs à la con » doit être un genre de »pléonasme » que je ne connaissais pas.
Excellent site très instructif!
Il existe de nombreuses interrogations existentielles souvent anesthésiées par nos petites habitudes quotidiennes.
La curiosité est une belle qualité!
Enchanté Maître Djinnzz
Dans le monde merveilleux de la VPC (vente par correspondance) il y a un pléonasme récurrent qui me fait grincer des dents depuis longtemps, « le cadeau gratuit ». Grrrrr!
Je viens de découvrir votre site et votre article sur les pléonasmes. Eh oui ils sont partout , et encore il en manque dans la liste que vous soumettez tel deux jumelles (eh oui elles pourraient être trois, c’est bien de préciser) J’ai vu que j’avais de nombreuses heures de lecture sans fautes d’orthographe. Ce n’est pas le sujet de cet article, mais je voulais vous remercier de faire des articles sans fautes d’orthographe ce qui est reposant , car c’est ennuyeux de lire des phrases remplies de fautes (j’en fais aussi mais je m’arrange pour les corriger) et sur Internet des fautes il y en a !!! Même des articles de journalistes!! Et ce qui m’énerve le plus c’est quand j’entends dire » un espèce » Le plus triste c’est que l’orthographe ça devient du n’importe quoi ….
Je ne sais pas pourquoi, les gens s’acharnent sur les pléonasmes alors qu’il s’agit d’une figure de style. Personne ne vient critiquer quand on emploie une métaphore, alors pourquoi le pléonasme ? Au jour d’aujourd’hui est parfaitement correct et peut être sans soucis.
bonjour
peut-on dire DANS l’intérieur?
merci
J’ai l’impression que le terme alcoolémie désigne tout simplement l’alcool dans le sang (ema en grec signifie sang ) d’où anémie, hyperhémie etc
En fait il y a problème logique parce que la langue aime la concordance logique, grammaticale et sémantique. Or, cependant, toutefois, s’il y a concordance il y a pléonasme. Gilles s’assied sur la chaise, c quasiment un pléonasme si on veut, Gilles ne va pas faire le poirier sur la chaise, donc le verbe s’asseoir est un redondant, on devrait recourir à un verbe plus neutre s’installer, se poser, se reposer, etc. et 1001 autres exemples du même ordre. Autre exemple: les hommes portaient des pantalons verts et les dames des robes rouges. en fait ce n’est pas utile de dire les dames, puisque ce sont les personnes qui portent des robes, et on sait déjà que ce ne sont pas des hommes, donc on pourrait dire « les autres », l’élégance en prend un coup, mais l’économie est là. Etc.