L’Effet Veblen, les marques et le snobisme
C’est quoi, le snobisme ?
Être snob, c’est avant tout vouloir se démarquer du commun des mortels en cherchant à appartenir à une classe sociale supérieure à la sienne… et à le montrer de façon ostentatoire ! En imitant ainsi des habitudes de vie qui ne sont pas les siennes, le snob se ridiculise sans même s’en rendre compte.
Même si le mot snob n’apparaît en Angleterre que vers 1820, ce phénomène n’est pas nouveau : déjà, dans la Rome antique, on récompensait certains plébéiens (les gens du peuple) en leur permettant de fréquenter les lieux du patriciat…
En 1901, le Chambers Dictionary définit le mot en des termes peu élogieux :
Snob, n. : a vulgar person, especially one who apes gentility, a tuft-hunter ; a workman who works for lower wages than his fellows, a rat, one who will not join a strike »
Chambers Dictionary, 1901
Que l’on pourrait traduire ainsi (mon anglais est rouillé) :
personne de mauvais goût, en particulier quelqu’un qui imite la haute-bourgeoisie, ; ouvrier qui travaille pour un salaire inférieur à ses collègues, qui ne veut pas faire la grève.
Le mot snob désigne donc à l’époque l’ouvrier qui se voudrait bourgeois mais aussi, par extension, le traître, le « casseur de grève », celui qui est du côté du patronat. Uns subtilité qui a disparu aujourd’hui.
L’effet Veblen
À la fin du XIXè siècle, l’économiste américain Thorstein Veblen (1857 – 1929) fut le premier à étudier le snobisme en tant que phénomène social. Il se rendit compte que, pour accroître les ventes d’un produit, baisser son prix n’était pas toujours une bonne idée. Au contraire, le rendre plus cher pouvait, dans certaines circonstance, le rendre plus désirable !
Puisqu’ils veulent ressembler aux « riches », les snobs veulent avant tout des produits réputés chers, indépendamment de leur qualité.
Ceci explique les bénéfices conséquents du marché de luxe : contrairement aux autres biens de consommation, leurs prix de vente sont décorrélés de leurs coûts de production. Plus c’est cher, plus ça se vend – et, accessoirement, plus les actionnaires se gavent…
Des exemples ?
Les sacs Louis V. (je n’écris pas le nom en entier mais vous l’aurez reconnu), avec leurs motifs si connus, tomberaient très certainement dans l’oubli si on les trouvait dans les rayons du Super U du coin à 10€… Les marques ont tout à fait conscience que la valeur de leur produit se trouve dans leur rareté. Ceci explique leur lutte acharnée contre les contrefaçons. Ces dernières banalisent leur produit et tend donc à annihiler l’effet Veblen !
L’effet Veblen explique également comment, en sortant de la même ligne de production, un T-shirt sera vendu du simple au décuple (voire plus !) selon le logo qui y sera associé. On touche ici également au phénomène complexe d’identification à une marque, particulièrement prégnant chez les adolescents et bien connu des spécialistes du marketing.
Est-on tous des snobs ?
Contrairement à la fin du XIXe siècle, période où Thorstein Veblen développa sa théorie, l’effet Veblen semble ne plus se cantonner aujourd’hui aux seules personnes snobs. Il s’est diffusé dans l’ensemble de la société : tout le monde juge et est jugé, même inconsciemment, selon la marque de sa voiture, celle de son téléphone, la taille de son appartement ou la couleur de sa carte bleue…
Triste époque.
Bon, c’est pas de tout ça, mais je dois vous laisser : j’ai mon Aï-phone XX qui sonne…
(oui, je sais, il n’est pas encore sorti, et alors ? J’ai acheté une contrefaçon pakistanaise)
(ne me jugez pas)
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Djinnzz
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D’où, également, les prix faramineux des iPhone et le succès d’Apple… Ou de Samsung d’ailleurs maintenant !
Ou celui des montres étanches jusqu’à 200m de profondeur.
C’est quand même pratique, les montres étanches jusqu’à 200 mètres de profondeur, au cas où un jour une dorade te demande l’heure.
Tu m’as explosé de rire!
Tout le monde le voulait mais maintenant qu’on l’a, on est un peu déçus…finalement, l’Iphone 6, c’est un peu comme François Hollande…
Thorstein Veblen est une figure importante mais méconnue, dans le contexte francophone, de l’histoire des sciences sociales. Il a ouvert des pistes majeures, explorées en économie (par les institutionnalistes ou les tenants d’une économie évolutionniste) et en sociologie (de l’économie, de la consommation, de la stratification sociale).
bien expliqué.
es ce que ce phénomène peut s’observer aussi pour les services?