Frédéric II de Prusse, un monarque éclairé
Monarque éclairé, Frédéric II de Prusse (1712 – 1786) a façonné la géopolitique européenne de son époque… Retour sur la vie hors du commun de ce monarque éclairé »
Jeunesse difficile ? Non, pire !
Un bon récit commence (souvent !) par une enfance difficile. Le jeune Frédéric, sans cesse houspillé par son père l’Empereur Frédéric Ier, ne déroge pas à la règle. On lui reproche ses manières raffinées et… efféminées. L’amour qu’il porte à son ami Katte (prononcez « Cateuh ») n’arrange pas les choses !
À l’âge de 18 ans, les deux amoureux tentent de s’enfuir pour l’Angleterre. Un fils d’empereur qui fuit la Cour et ses responsabilités au bras de son amant, voilà de quoi nourrir un beau scandale !
Sans surprise, ils n’iront pas bien loin… Repérés par la garde impériale, ils sont aussitôt conduits auprès de l’empereur. Ce qui pourrait n’être qu’une fugue anodine commise par un adolescent mal dans sa peau se transforme en véritable drame : arrêtés, Frédéric et Katte sont jugés pour haute trahison.
Et autant dire que le châtiment va être exemplaire ! En tant que rejeton de l’Empereur, Frédéric ne risque pas grand chose. Mais son ami Katte ne dispose pas de cette « immunité diplomatique » : il est condamné à mort au terme d’un procès expéditif. Comble de l’horreur, Frédéric Ier impose à son fils d’assister à la décapitation. Cette image le hantera toute sa vie.
Homosexuel… et farouche guerrier !
À la mort de son père en 1740, Frédéric monte enfin sur le trône à l’âge de 28 ans. Commence alors un règne de conquête, où Frédéric II ne cessera de guerroyer et de montrer à l’Europe entière que la Prusse n’est plus une nation de seconde main. Et il guerroie bien, le bougre ! D’abord il parvient à réaliser l’annexion de la Silésie en 1742 et continue sur sa lancée avec de nombreux autres petits duchés. Il parvient à réunifier l’ensemble des régions morcelées de la Prusse en s’octroyant un vaste territoire, sorte de corridor de Dantzig avant l’heure. C’est bien simple, sous son règne, la Prusse a quasiment triplé de superficie !
Grâce à l’action militaire de Frédéric II, la Prusse devient alors une nation forte et crainte par l’Europe entière. Son Empereur incarne à lui seul l’esprit combattant par excellence : fin stratège, il est aussi un monarque guerrier qui ne compte pas le nombre de chevaux tués sous lui sur le champ de bataille. Dur avec ses soldats, il n’en reste pas moins respecté de tous pour se placer souvent en première ligne, là où ses homologues européens observent les combats à la longue vue.
Icône gay ?
Non content d’être un conquérant, Frédéric II de Prusse est un homme cultivé et raffiné. Musicien, poète, il entretient des relations privilégiées avec les têtes pensantes de l’époque, notamment avec Voltaire qui s’installe quelques temps à sa cour.
Il meurt de sa belle mort, à 74 ans, en ayant réussi à redonner à son pays cohésion et fierté. Gageons que son père, qui méprisait totalement sa supposée faiblesse et son homosexualité, aurait été très étonné de voir ce qu’il est parvenu à accomplir !
Voilà ce qu’écrit Voltaire à propos de Frédéric II de Prusse :
«Il faisait venir deux ou trois favoris, soit lieutenants de son régiment, soit pages ou jeunes cadets. On prenait le café, celui à qui on jetait le mouchoir restait un demi-quart d’heure en tête à tête. Les choses n’allaient pas jusqu’aux dernières extrémités, attendu que le prince, du vivant de son père avait été fort maltraité dans ses amours de passade, et non moins mal guéri. Il ne pouvait jouer le premier rôle, il lui fallait se contenter des seconds… »
Voltaire, Mémoires
Selon Voltaire, le traumatisme d’enfance que subit Frédéric troubla à jamais sa sexualité… Bien qu’invité auprès de la Cour de l’empereur, Voltaire ne fut jamais considéré comme un « proche » : Une réflexion à ne pas prendre comme parole d’évangile, donc ! D’autre part, il reste bien sûr à savoir ce que Voltaire entendait pas « premier » et « second » rôle dans une relation homosexuelle !
(j’ai bien ma petite idée #3615clichés)
Incarné à l’écran par une femme !
Au passage, un grand bravo à Arte qui a diffusé début 2012 un docu-fiction sur Frédéric II de Prusse, à l’occasion des 300 ans de sa naissance. Un programme plutôt culotté puisque Frédéric y est incarné à l’écran par… une femme ! L’effet est assez déroutant au début, mais l’actrice joue au final très bien son rôle et le vieillissement du héros est digne des effets spéciaux de Benjamin Button ! Pour quand ce genre de programmes en prime-time sur TF1 ?
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C’est pas plutôt en 1786 qu’il serait décédé? De 1712 à 1760, ça ne lui donne que 48 ans.
Effectivement… La coquille est maintenant corrigée.
Merci!
« Il meurt de sa belle mort, à 74 ans »
Je me suis toujours demandé comment une mort pouvait être belle…
Très bon article, au demeurant. Frédéric II était un grand homme qui mériterait qu’on parle plus de lui.
J’ai du mal à évaluer l’impact que pouvait avoir un homme, qui plus est chef d’état et chef de guerre, qui affichait ouvertement son homosexualité.
Comment étaient perçus les gays à l’époque ? Par la moquerie ? Le dégoût ? L’indifférence ? La tolérance ?
J’ai l’impression que l’homophobie est très récente (XXe siècle) et que pendant des siècles ne se préoccupaient pas l’endroit où leur voisin mettait leur bistouquette…
Certes, l’Eglise condamnait l’homosexualité, évidemment. Mais elle condamnait aussi l’onanisme (action de se masturber, comme Onan dans la Bible qui « gâche sa semence sur le sol ») et je suis à peu près persuadé que cela n’empêchait pas les hommes de se branler.
S’il y avait de la tolérance pour l’nanisme, pourquoi n’y en aurait-il pas eu pour l’homosexualité ?
Le fait que Frédéric II ait été à ce point respecté semble aller dans mon sens…
Intéressant. Cependant à préciser : Voltaire ayant quitté le roi un peu fâché, et ayant une grande habitude des pamphlets, il n’a pas dû être très sincère dans ses écrits et a voulu se venger.
Cependant, il est vrai que l’Histoire ne manque pas de monarques homosexuels : un homo du peuple, on le brûlait, un homo royal, on faisait semblant de ne pas avoir compris…
Ah oui ! Comment dire, Frédéric 2 n’a jamais été empereur (ni non père d’ailleurs, qui n’est pas Frédéric premier mais bien Frédéric Guillaume premier) mais roi de Prusse.